Origines, caractéristiques, symptômes
Cette page se veut un résumé accessible de la recherche scientifique récente sur l'endométriose.
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Résumé
Les symptômes de l'endométriose varient entre les individus atteints, et la pathologie a certainement plusieurs origines et facteurs potentiels. Dans des termes scientifiques, ces deux caractéristiques veulent dire que la pathologie est hétérogène et multifactorielle. La maladie est aussi caractérisée par des réponses diverses aux différentes thérapies : différentes personnes réagissent différemment aux mêmes traitements.
De façon générale, l'endométriose peut être décrite comme des stroma et des épithéliums (tissus) avec une fonction glandulaire qui ressemblent à l'endomètre, mais qui en sont distincts, et qui se retrouvent en dehors de l'utérus. On les appelle couramment des lésions : ces lésions d'endométriose ont été retrouvées partout dans le corps humain, y compris dans les poumons, le diaphragme, le cœur, et à bien d'autres endroits.
Les tissus et stroma de l'endométriose sont différents de l'endomètre. Les biopsies chirurgicales (prélèvements de tissus) permettent de les distinguer ; c'est ainsi qu'une endométriose est diagnostiquée en chirurgie. Une excellente revue de littérature scientifique (en anglais) explique en plus de détail : The Pathogenesis of Endometriosis: Molecular and Cell Biology Insights, Laganà et al 2019 ("La Pathogenèse de l'endométriose : des aperçus provenant de la biologie moléculaire et cellulaire").
Définitions basées sur les preuves : Étant donnés les nombreux comportements invasifs, adhésifs et multiplicatifs des lésions d'endométriose qui diffèrent de ceux de l'endomètre natif (Delbandi et al 2013), il ne s'agit pas juste d'un reflux d'endomètre. Les lésions ectopiques (externes à l'utérus) sont des entités distinctes au niveau moléculaire comparées à l'endomètre eutopique (interne à l'utérus) et aux échantillons de contrôle (Ahn et al 2016). D'autres études ont aussi démontré que les lésions d'endométriose sont dissimilaires aux niveaux fonctionnel et cellulaire (Zanatta et al 2010, Freger et al 2021, Fonseca et al 2023).
La prévalence de l'endométriose est estimée à entre 0,9% et 22% (Simpson JL 1980, Guo SW 2006). Une revue de littérature scientifique plus récente a trouvé une prévalence pour la population générale de 18% (Moradi et al, 2021). La même revue a trouvé une prévalence respective de l'endométriose chez les personnes assignées femmes à la naissance : 31% avec une infertilité, 42% avec des douleurs chroniques pelviennes, et 23% asymptomatiques.
Origines et caractéristiques
L'endométriose est théorisée comme provenant de diverses cellules d'origine : des fragments et/ou restes de Müller, la Müllérianose (Batt RE, Smith RA, Buck Louis GM, Martin DC, Chapron C, Koninckx PR, Yeh J. Müllerianosis. Histol Histopathol. 2007 Oct;22(10):1161-6) et la Müllériose (Redwine D commentary on Signorile PG, Baldi F, Bussani R et al. (2009)), des fragments d'endomètre, des précurseurs dans des fragments et dans de l'endomètre traumatisé, des cellules souches mésenchymateuses, des cellules souches épithéliales, et des changements à l'intérieur de l'utérus.
Concernant l'endométriose, ces cellules d'origine seraient alors disséminées, les théories étant une croissance par expansion et/ou par infiltration, des restes embryonnaires dans des localisations Müllériennes (vagin et trompes de Fallope) et aussi non-Müllériennes (bassin pelvien, intestin, poumons, et ainsi de suite). Le reflux menstruel est seulement une théorie potentielle de dissémination (Wang Y, Nicholes K, Shih IM. The Origin and Pathogenesis of Endometriosis. Annu Rev Pathol. 2020;15:71-95.) En effet, la grande majorité des personnes avec des menstruations ont un reflux menstruel ; environ 90%. Seules une partie ont une endométriose. Aussi, l'endométriose a été retrouvée dans des localisations impossibles à atteindre par un reflux menstruel ; on peut notamment citer l'étude récente de Dr Possover à ce sujet : Laparoscopic morphological aspects and tentative explanation of the aetiopathogenesis of isolated endometriosis of the sciatic nerve: a review based on 267 patients.
Les lésions d'endométriose réagissent à différents stimulus, bien que l'étendue des réactions varie entre les personnes atteintes. Les stimulus identifiés à ce jour incluent l'inflammation, l'infection (virale et/ou bactérienne), l'œstrogène, la progestérone, et des traumatismes physiques (accouchement, curetage, chirurgie).
D'après Dr Martin DC dans ses 'Concepts et Théories de l'endométriose' (en anglais) : "la transition de cellules souches normales de Müller ou non, à des formes d'endométriose plus développées telles que l'endométriose infiltrante ou l'endométriome (type de kyste ovarien rempli d'endométriose), semble avoir le plus de potentiel pour la recherche scientifique et d'éventuelles nouvelles thérapies. La transition implique une modulation immunitaire, une maturation neuroimmunitaire, un dysfonctionnement immunitaire, une surcharge immunitaire, un échappement immunitaire, et des changements histologiques (moléculaires), biochimiques, réactifs, angiogéniques (impliquant les veines et vaisseaux sanguins), immunologiques, génétiques, régulés par des gènes (épiénétique non héréditaire), génétiquement modifiés, hormonaux, et encore d'autres changements qui distinguent une endométriose de l'endomètre, des vestiges ou restes de Müller, et des cellules souches non-Müllériennes."
Symptômes
Bien que les douleurs pelviennes soient le symptôme le plus connu de l'endométriose et l'adénomyose, ces douleurs ne sont pas systématiques avec les deux pathologies. Quand une douleur est présente, elle ne correspond pas forcément non plus à la sévérité ou la localisation des lésions. Une douleur peut aussi être liée à d'autres problèmes ou pathologies. Quant à l'endométriose, les douleurs peuvent survenir en dehors des menstruations, alors qu'avec une adénomyose, la douleur est généralement associée aux menstruations (notamment des crampes utérines).
Quant à d'autres symptômes d'endométriose, il y a des douleurs dans le bas du dos, dans les jambes, lors du passage des selles, des changements au niveau de la vessie avant et pendant les menstruations, des gonflements du ventre avant et pendant les menstruations (souvent appelé "endo belly", de l'anglais pour "bide endo"), de la fatigue, et une infertilité ou des difficultés avec la fertilité.
Des douleurs en respirant et/ou au niveau de l'épaule gauche pendant les menstruations peuvent être une indication d'endométriose du diaphragme ou des poumons. Un pneumothorax ou une toux avec du sang peuvent aussi être des indications d'endométriose pulmonaire. L'association américaine Extrapelvic Not Rare a mis en ligne des descriptifs en anglais et des liens vers de la recherche scientifique concernant l'endométriose thoracique ainsi que d'autres formes extra-pelviennes (en dehors du bassin pelvien).
Diagnostic et traitements
Bien que les recherches avancent sur des biomarqueurs et autres méthodes non invasives de diagnostic, au jour d'aujourd'hui, aucun n'a encore été validé cliniquement. Des avancées ont été faites en imagerie – notamment en IRM et en échographie – dans l'identification des stroma et tissus à fonction glandulaire typiques de l'endométriose, ainsi que pour l'adénomyose. Cependant, en imagerie cela dépend de la formation et des compétences de l'imagiste, et néanmoins, ne peut pas identifier toute endométriose ou adénomyose. Quelques citations provenant de revues scientifiques récentes : "Une laparoscopie (ou cœlioscopie) reste le standard en or pour le diagnostic de l'endométriose, et les tests non-invasifs doivent seulement être utilisés dans un cadre d'étude scientifique" ; "Aucune imagerie n'a atteint les critères pour remplacer un diagnostic chirurgical de l'endométriose pelvienne, bien que une échographie a pu s'y rapprocher en termes de test de triage SpPin" (Nisenblat et al 2016 concernant les biomarqueurs, et Nisenblat et al 2016 concernant l'imagerie). L'adénomyose peut aussi être diagnostiquée lors d'une laparoscopie ou d'une hystéroscopie, cette dernière étant moins invasive qu'une laparoscopie ou une cœlioscopie.
Il y a de nombreux débats, mais une chirurgie d'exérèse menée par un expert bien formé, expérimenté, et bienveillant reste le standard en termes de traitement de l'endométriose. Comme décrit par Pundir et al 2017, "Les preuves, certes limitées, que nous avons à disposition, démontrent qu'à 12 mois post-chirurgie, les symptômes de dysménorhée (douleurs avant ou pendant les menstruations), de dyschézie (douleurs lors du passage de selles), et de douleur pelvienne chronique secondaire à l'endométriose, s'améliorent de façon significative avec une chirurgie d'exérèse en comparaison avec une chirurgie d'ablation ou de vaporisation ('brûler' des lésions)." La chirurgie comporte des effets secondaires tels que des adhésions (tissu cicatriciel) et potentiellement des complications plus rares. Pour l'endométriose, les chirurgiens suffisamment bien formés, expérimentés, et réellement experts sont encore assez rares et donc difficilement accessibles pour beaucoup de personnes atteintes ; en effet les compétences des chirurgiens sont un facteur clé dans les résultats.
Résumé de littérature scientifique par Anna M. Stevenson
Cette page est régulièrement mise à jour en fonction des avancées de la recherche scientifique.